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Depuis la signature le 6 juin 2025 du nouveau protocole d’accord sur la pêche entre la Côte d’Ivoire et l’Union Européenne (UE), les navires européens des 27 pays de l’union pêchent dans les eaux ivoiriennes. Ils sont autorisés à capturer environ 6 100 tonnes de thon et d’autres espèces migratrices par an. Ce, en contrepartie d’une manne financière de 481 000 000 F CFA par an ; soit environs 5 731 000 000 F CFA qui seront versés à l’Etat ivoirien sur la période 2025-2029.

Mais quel est l’impact de ce protocole sur la filière pêche dans un contexte économique mondial où ce genre de collaboration est de plus en plus décrié dans les pays africains dont le Sénégal et le Gabon, qui ont d’ailleurs décliné l’offre de l’UE ? 

L’Union des marins pêcheurs de Côte d’Ivoire (UMPCI), tout en saluant l’augmentation de 8,5% de la contrepartie financière de ce nouvel accord, par rapport au précédent protocole arrivé à échéance l’année dernière, plaide pour le développement d’une véritable industrie de la pêche avec des navires thoniers nationaux afin de préserver nos eaux de ce genre de collaboration. Selon son secrétaire général, commandant Gnoukouri Yves Demoya, maître de pêche à la pêche thonière et inspecteur des navires, le nouveau protocole est bon si l’on s’en tient relativement à la contrepartie financière.

Cependant, au-delà de la contrepartie financière, ce protocole n’est pas avantageux pour la Côte d’ivoire.  « En tant que maître de pêche, mon cœur saignait chaque fois que je devais pêcher dans nos eaux pour d’autres Etats et voir que la contrepartie financière de mon pays que l’on brandit est en dessous de la valeur des bronchites, des nageoires et des tripes du poisson, qui sont broyées pour en faire la nourriture des poulets », déplore le spécialiste.

Pour lui, il faut relancer la pêche industrielle afin de développer un secteur d’activité pourvoyeur d’emploi. « Dans les années 70, la pêche thonière en côte d’Ivoire était pratiquée par les Français, les Espagnols, les Portugais, les Américains et les Russes. Ensuite, l’Etat a créé l’Académie des sciences et techniques de la mer pour former des professionnels nationaux du secteur de la pêche. Et puis la Société ivoirienne de pêche (SIP) a été créée avec le lancement de 8 navires thoniers. Elle a joué un rôle important dans le développement d’un secteur de la pêche thonière ivoirienne. Elle était chargée de la pêche, de la commercialisation et de la transformation du poisson, contribuant ainsi à l'approvisionnement du marché intérieur et à l'exportation », explique Cdt Gnoukouri Yves Demoya.

Et de poursuivre : « Malheureusement, ce beau projet a fait faillite. Nous pensons qu’il faut juste reconstituer cette société et la doter d’au moins une dizaine de navires thoniers senneurs pour remettre en selle ce projet prometteur de l’Etat de bâtir une pêche industrielle. Si la Côte d’Ivoire a pu s’offrir 8 navires thoniers dans l’année 70, ce n’est pas 10 navires qu’elle ne peut pas mettre à la disposition de tous ces jeunes marins pêcheurs et autres travailleurs du secteur pour développer une véritable industrie de la pêche et éviter d’accepter des accords qui, en réalité ouvrent la voie à la surexploitation de nos eaux. La Côte d’Ivoire à l’instar de nombreux pays d’Afrique de l’ouest fait face à une raréfaction de ses ressources halieutiques. Il faut se donner les moyens de mettre un terme aux renouvellements des accords de pêche sur le thon afin d’éradiquer la pêche illicite et la surexploitation de nos eaux ».  

Abou Adams