RDC: deux condamnés de la CPI de retour à Kinshasa
Deux anciens miliciens condamnés par la Cour pénale internationale (CPI) ont quitté la prison de Scheveningen ce vendredi 18 décembre pour rejoindre Kinshasa. Les Pays-Bas, qui accueillent la Cour et plusieurs tribunaux ad hoc à La Haye, ne souhaitent pas que les Congolais purgent leur peine sur leur sol. Une fois jugés, ils sont alors renvoyés sur leurs terres ou dans un autre pays d’accueil.
Germain Katanga et Thomas Lubanga ont quitté la prison de la Cour pénale internationale ce vendredi 18 décembre pour rejoindre la centrale de Kinshasa, où ils devront finir de purger leur peine.
Condamné à quatorze ans de prison pour avoir enrôlé des enfants de moins de quinze ans dans ses troupes et les avoir fait participer aux hostilités, l’ex-patron de l’Union des patriotes congolais (UPC), Thomas Lubanga, a déjà fait plus des deux tiers de sa peine et devra désormais en purger la fin en République démocratique du Congo (RDC).
Pour Germain Katanga, la situation est différente. Reconnu coupable d’avoir stocké et distribué les armes utilisées lors du massacre de Bogoro, en Ituri, le 24 février 2003, il a été condamné à douze ans, mais a bénéficié d’une libération anticipée. L’ex-milicien devrait donc quitter la prison de Makala le 18 janvier 2016.
Les adieux en prison
« Il a été ici pour presque huit ans, et oui, il est évidemment très heureux », explique son avocat David Hooper. L’après-midi du 18, celui qui fut élu chef cuistot par ses pairs a dû faire ses adieux en prison. « Le président Gbagbo était là, Jean-Pierre Bemba, Blé Goudé… Apparemment, il y a eu des larmes. Ils ont formé une petite communauté très proche », rappelle Maître Hooper.
De retour en RDC, que fera cet ancien chasseur d’okapis ? Il pourrait ne pas en avoir tout à fait fini avec la justice. Lors de son transfèrement à La Haye en octobre 2007, Germain Katanga, qui avait rejoint les rangs de l’armée régulière à la faveur d’un accord de paix, était déjà incarcéré à Kinshasa dans le cadre d’une attaque contre des casques bleus bangladais en Ituri, ayant fait neuf morts dans leurs rangs.
Plusieurs Congolais sont incarcérés à Kinshasa pour ces faits, dont Pierre Mbodina, qui était venu déposer à La Haye dans le procès Katanga. Après avoir demandé l’asile politique aux Pays-Bas, il avait finalement été renvoyé en prison à Kinshasa. Mais après dix années passées en préventive, Pierre Mbodina, qui souffre de diabète, demande sa mise en libération provisoire depuis plusieurs semaines, sans succès.
Avenir incertain
Une demande que pourrait à son tour faire Germain Katanga. « Il était à Kinshasa, à 2 000 km de la scène de crime, commente Maître Hooper. Il n’y a rien dans ce dossier, mais je suppose que Kabila a peur que la libération de Germain Katanga en janvier puisse avoir un effet négatif sur l’élection présidentielle de l’année prochaine. Il pourrait donc garder Katanga et les autres jusqu’après les élections » craint-il.
Que fera le détenu une fois libéré ? A la Cour, il avait exprimé à plusieurs reprises sa compassion pour les victimes et promis d’aider à la réconciliation dans l’est de la RDC. Mais pour le reste, c’est l’inconnu. « Je ne crois pas qu\'il ait une claire idée de quoi faire, explique l’avocat britannique. Et qui pourrait le blâmer ? Il a été en prison pour dix ans, dont huit ans en Hollande, il est encore relativement jeune, il a 38 ans. Sa vie a été gelée avant que la guerre ne commence, depuis que Kabila père a envahi le Congo, ce sont les événements qui ont conduit l\'existence de Germain Katanga pour les vingt dernières années. »